Mettre fin à une exploitation agricole est toujours un moment délicat. A l'heure de la retraite, Joseph Saint-Eve a fait de choix de revendre ses terres parmi lesquelles, plus de 26 ha de prairies et 12 ha de terres cultivées. La commune d'Insviller était par ailleurs propriétaire de 12 ha supplémentaires exploitées par Joseph.
Des inventaires botaniques
réalisés sur les parcelles exploitées par Joseph ont révélé des prairies humides oligotrophes à Molinie et Succise des prés, habitat d'intérêt européen issus de plusieurs décennies de pratiques
agricoles extensives. Le Conseil Scientifique Régional de Protection de la Nature (CSRPN) a été saisi pour statuer sur l'avenir de ces prairies. Ce dernier a délibéré en faveur de l’extension du
périmètre de Zone Naturelle d'Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF) de la Kohlmatt justifiant ainsi une mise en protection des parcelles.
Afin de conserver le caractère patrimonial de ces prairies, Joseph Saint-Eve a accepté de vendre l'ensemble de ses terres à la SAFER en vue de leur mise en protection. Le Conservatoire des Sites
Lorrains a acquis ces prairies avec les financements de l'Agence de l'eau Rhin-Meuse et de la Région Lorraine. Parallèlement, le Conseil Municipal a accepté d'échanger ses prairies contre les
terres cultivées nouvellement acquise par le CSL. L'ensemble des parcelles a été loué aux agriculteurs locaux moyennant le respect d'un cahier des charges préconisant la non mise en culture, une
fauche tardive et l'absence d'engrais. En compensation de cette contrainte agricole, les agriculteurs ont pu contractualiser des Mesures Agri-Environnementales « prairies remarquables
».
Malgré les nombreux obstacles rencontrés pour mener à bien ce projet, on retiendra que :
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le vendeur a vendu son exploitation à prix correct
- 38 ha de prairies supplémentaires sont protégées à Insviller
- la commune a échangé 12 ha de prairies patrimoniale contre 12 ha de terres cultivées
- la commune a réglé son problème récurent de vente d'herbe sur pied sur le Roter Hugel
- les agriculteurs d'Insviller ont augmenté leur surface agricole utile pour un loyer modéré et bénéficient de mesures agri-environnementales durant 5 ans
- Insviller ne manquera pas de foin durant les sècheresses
Voici un partenariat gagnant-gagnant entre intérêt agricole, intérêt public et intérêt écologique qui laisse enfin présager une ouverture nouvelle entre l'agriculture et la protection de la nature, et tant mieux ! Considérant que la France ne parviendra jamais à concurrencer l'agriculture hyper-intensive d'autres pays dont les produits inondent nos supermarchés, pourquoi ne pas imaginer un nouveau modèle d’agriculture respectueuse de la santé, de la terre, de la vie et de l'exploitant agricole ?
Prochaine étape : l'étang du Moulin.